Blottie sur quatre hectares dans un quartier résidentiel de Christchurch – qui, malgré son statut de capitale de l’île du Sud de la Nouvelle-Zélande, n’en ressemble pas à moins à un quartier résidentiel géant – Tamariki fait plus penser à une maison de vacances capable d’accueillir de grandes cousinades qu’à une école. Dans une salle de 25 mètres carrés, des femmes aux cheveux très blancs discutent autour d’une tasse de thé, confortablement assises dans un canapé au milieu de milliers de pièces de puzzle, tandis qu’une petite fille fait de la peinture et que d’autres enfants passent en riant dans le couloir, affublés de grandes robes à frou-frou. Dans une salle attenante, une autre grand-mère fait des maths avec trois jeunes filles de 12 ans alors qu’un garçon de six ans poursuit une amie en la chatouillant, avant de sortir du bâtiment pour aller jouer à un jeu collectif sur une grande pelouse. Là se trouve une quarantaine d’enfants, qui jouent à une sorte de chat glacé. Une autre grand-mère est assise dans un fauteuil roulant, un thé à la main (toutes les enseignantes que j’ai vues étaient de douces grand-mères constamment armées d’une tasse de thé). Elle veille à la sécurité des enfants mais n’intervient jamais dans l’organisation de celui-ci…
Tamariki, une école démocratique s’inspirant des travaux de l’éducateur britannique A. S. Neill, est l’une des deux écoles que j’ai visitées en Nouvelle-Zélande, et certainement celle qui ressemble le moins à une école traditionnelle.
Fondée à Christchurch en 1967, par une poignée de parents dont les enfants fréquentaient le même Playcentre (une sorte d’école maternelle dont la philosophie est que l’enfant apprend principalement grâce au jeu libre, dans un environnement protecteur), Tamariki était au départ une école entièrement privée mais est désormais une école publique bénéficiant de ce que les Néo-zélandais appellent le Special Character. C’est-à-dire que l’école doit suivre le programme du ministère de l’éducation néo-zélandais tout en ayant une liberté totale dans les moyens pédagogiques mis en place pour y arriver. Ce changement de statut peut permettre à certaines écoles de devenir entièrement gratuites si leur coût d’exploitation ne dépasse pas celui d’une école publique conventionnelle de taille équivalente. Ce qui n’est pas le cas de Tamariki, où le coût de la scolarité reste de 2094 dollars par an par enfant (soit 1373 euros).
Notons qu’en Nouvelle-Zélande, le programme national diffère beaucoup du programme français, en ce qu’il se préoccupe bien plus de compétences que de savoirs précis, ce qui laisse une large marge de manœuvre aux établissements ainsi qu’aux enseignants.
Je ne suis resté qu’une journée à Tamariki, car je n’en ai entendu parler qu’à la fin de mon séjour à Christchurch. Ce n’est sans doute pas suffisant pour me permettre d’apporter un jugement définitif sur le travail qui y est réalisé tout au long de l’année, mais j’y ai trouvé ce que j’y ai vu extrêmement intéressant et souhaite le partager avec vous.
On pourrait résumer la philosophie de l’école par « Libres et responsables. » Je n’ai certainement jamais vu une école où les enfants étaient aussi libres de leurs mouvements et de leurs apprentissages, sans intervention extérieure. Ni non plus d’école où les enfants étaient rendus à ce point responsable du bon fonctionnement de leur communauté.
Ce qui m’y a dérangé le plus en revanche, c’est qu’en l’absence d’interventions initiées par les adultes, les enfants ne sont que très peu exposés à des savoirs et à la richesse du monde.
J’aimerais expliciter ces éléments.

Les « meetings », ou l’expérimentation de la démocratie directe et de la médiation dès 5 ans
Les réunions d’école
Vers 10h, je vois une petite fille rousse, un ours en peluche sous le bras, parcourir l’école en clamant : « whoooooole schooooool meeeeeeeting, whooooole schooooool meeeeeeeting » (« réunion de toute l’école »). Tous les enfants et adultes abandonnent rapidement leurs activités pour se rassembler dans la pièce centrale de l’école, où peuvent tenir les 57 enfants, les enseignantes et quelques mamans présentent. On s’assoie sur les canapés, sur des chaises, tabourets, ou par terre.
Certains ont déjà commencé à manger leur repas du midi (chacun apporte sa lunch box et peut cuisiner ou réchauffer son plat dans la cuisine). La petite fille est chargée de présider la réunion. Elle a été désignée par une fille encore plus jeune qui souhaite obtenir l’accès exclusif à un arbre sur lequel elle aime bien jouer. Après un débat dépassionné mais nourri néanmoins par les nombreuses interventions des enfants, qui doivent attendre que la Présidente leur donne la parole pour s’exprimer, la présidente demande si « la motion de X est acceptée. » A lieu alors un vote à main levée, et presque tous les enfants rejettent la dite mention, sans pour autant que la petite fille ne s’en émeuve.
« Y a-t-il d’autres sujets qui doivent être discutés ? » poursuit la Présidente ?
S’ensuivent de courtes discussions concernant les règles d’utilisation de la cuisine, de la salle à déguisement, etc. Des enfants commencent à se lasser mais ne dérangent pas pour autant le déroulé de la réunion. Un garçon s’endort au bout de 50 minutes et même les adultes commencent à perdre patience. « Plus aucun sujet à discuter ? la réunion est levée. » proclame la présidente. Tous partent alors en courant et riant à leurs occupations.
Pendant toute la durée de la réunion, les adultes ont peu pris la parole, et selon les mêmes règles que les enfants. Leurs motions peuvent aussi bien être déclinées que celles des enfants si celles-ci ne remportent pas l’adhésion collective. « Quand on a une idée qui permettrait de résoudre un problème soulevé par des enfants, on évite de donner notre « réponse », car le but c’est que les enfants réfléchissent. Si c’est un problème qui persiste, alors nous intervenons », m’explique une enseignante.
Bien que l’école ne s’attribue jamais le label d’ « école démocratique », elle ne s’inspire pas moins de l’internat de Summerhill, fondé par A. S. Neill, l’homme à l’origine de ce mouvement pédagogique qui souhaite permettre à l’enfant d’être maître de sa vie, et notamment de l’organisation de l’environnement qui lui est dédié : l’école.
« Nul ne peut doit forcer autrui à faire quelque chose qu’il ne souhaite pas faire » : une institutrice.
Hormis des règles de sécurité telles que l’obligation de porter un chapeau et de la crème solaire quand l’on joue dehors, l’école n’a que deux règles qui ne changent jamais : « Nul ne peut doit forcer autrui à faire quelque chose qu’il ne souhaite pas faire » et « la réunion prime sur toute autre activité ». Tout le reste est matière à discussion et toute règle qui ne fonctionnerait pas peut être modifiée aussi vite que nécessaire en invoquant une de ces réunions d’école. « Parfois on en a 3 par jour, parfois 1 par semaine, il n’y a pas de règle ! » m’explique une maman dont deux des trois enfants sont scolarisés à Tamariki.

Le nombre d’élèves est volontairement limité à 60 chaque année afin de permettre cette forme de démocratie directe où tous peuvent s’exprimer.
Lors de ma journée à l’école, il n’y eu pas moins de 4 réunions ! La seconde ne dura que 10 minutes mais eu lieu 5 minutes après la première, ce qui fatigua particulièrement les plus grands qui venaient de se remettre à leurs activités. Les deux suivantes eurent lieu à plus d’une heure d’intervalle et se déroulèrent aussi bien que les premières, sans excéder trente minutes. A chaque fois, c’était des « petits » qui avaient demandé à ce qu’une réunion ait lieu. « C’est parfois un peu énervant pour les plus grands, mais ils savent que c’est un processus d’apprentissage normal. Plus l’année avancera, moins les petits auront le besoin de « prendre le pouvoir » par le biais de ces réunions », sourit l’une des enseignantes.
La réunion prime sur toute autre activité: une maman de quatre enfants.
A Tamariki, on estime que la démocratie directe est le seul moyen qui permette de répondre aux besoins de chacun dans le respect de tous. Et que l’on ne peut pas s’attendre à ce que la démocratie fonctionne à l’âge adulte si l’on n’a jamais permis aux enfants de l’expérimenter. Et lorsque l’on voit la violence que peuvent prendre les débats parlementaires dans certains pays où l’on finit même par en venir au point, il est agréable de voir à quel point les enfants de Tamariki sont bien plus doués pour échanger en écoutant les autres que la plupart des adultes. La discussion dans le respect de son interlocuteur y est un processus tellement habituel qu’elle peut être dépassionné et permettre de trouver des solutions répondant le mieux aux besoins de tous.
« Chacun sait qu’il peut être entendu, qu’il peut changer les choses dans l’école, qu’il n’est pas livré au pouvoir arbitraire d’un adulte ou de certains enfants »
explique une autre enseignante. « Dans ce contexte, nous n’avons que très rarement des cas de violence, il n’y a pas vraiment de possibilité d’être frustré. »
Certains des enseignants rencontrés dans d’autres écoles s’interrogent quant à la perte de temps induite par ce modèle qui permet à des réunions d’avoir lieu à tout moment de la journée. A mon sens, en tant qu’enfant plongé dans une activité passionnante, on pourrait vite être frustré d’être interrompu par des réunions inattendues. Je ne pense pas non plus qu’il soit nécessaire que ces réunions puissent avoir lieu à n’importe quel moment ni aussi souvent que possible.
En revanche il me semble essentiel que de telles réunions aient lieu régulièrement dans la classe voire toute l’école, sans avoir recours à des délégués mais bien en démocratie directe et non représentative.

Les réunions individuelles
En plus des réunions d’école, des réunions individuelles peuvent également être convoquées par les enfants lorsqu’ils estiment avoir besoin d’aide pour régler un conflit vis-à-vis d’un ou plusieurs autres enfants. D’après ce que j’ai pu voir, ces réunions sont souvent plus chargées émotionnellement mais les conflits auxquels j’ai assisté étaient vite désamorcés. Là encore, l’enfant qui souhaite qu’une réunion ait lieu demande à un enfant neutre de convoquer les personnes concernées, et celles-ci doivent abandonner toute activité pour se rendre au meeting. Il doit également solliciter un adulte aux cas où les enfants auraient du mal à contrôler leurs émotions. Le but est de permettre aux enfants de trouver des solutions à leurs conflits, ou simplement à un enfant de faire passer un message qui lui tient à cœur à un autre enfant. « Parfois, on ne trouve pas de solution, mais c’est pas grave, on peut pas s’attendre à trouver des solutions tout le temps ! » m’explique un garçon de 10 ans.
On ne peut apprendre que lorsque l’on se sent bien.
Le but ultime est là encore de faire que chacun se sente entendu, respecté, de développer un climat propice à la discussion et à l’apaisement des émotions plutôt qu’à leur cristallisation. « On ne peut apprendre que lorsque l’on se sent bien. Ca n’est pas possible lorsque l’on a des tonnes de soucis en tête, voilà pourquoi ces réunions priment sur toute autre activité. » Notons que les adultes aussi peuvent se voir convoquer à un meeting par un enfant !
L’école n’appliquant aucune forme de sanction, il est donc nécessaire que les enfants trouvent des solutions par eux-mêmes afin de faire que leur quotidien se déroule au mieux. Et il semblerait que ça marche plutôt bien.

Liberté totale dans le choix des activités
Le jeu libre (c’est-à-dire sans implication de l’éducateur) est considéré à Tamariki comme une forme d’apprentissage essentielle : intégration de règles, créativité, qualité d’écoute, patience, persévérance, etc. sont autant de compétences dont l’école souhaite doter ses enfants afin d’en faire des « individus épanouis contribuant efficacement et positivement à la société dans laquelle ils vivent », comme le décrit le fascicule de présentation de l’école.
« Tous les enfants finissent par apprendre à lire, écrire, compter, mais ça peut venir à 11 ans chez certains », m’explique une maman. «
Lors de ma journée d’observation, j’ai vu très peu d’enfants engagés dans des activités académiques. Il faut dire aussi qu’il faisait un temps magnifique. « Tous les enfants finissent par apprendre à lire, écrire, compter, mais ça peut venir à 11 ans chez certains », m’explique une maman. « Ma plus jeune fille a exprimé dès cinq ans l’envie d’apprendre à lire parce qu’elle voulait jouer aux cartes Yugiyo mais qu’il lui fallait pour cela déchiffrer ce qui étaient écrit sur lesdites cartes. D’autres enfants ne s’y mettent que plus tard, quand ils réalisent qu’ils auront besoin de ça pour avancer au collège et surtout trouver un job qui leur plaise. »
On ne force jamais les enfants à apprendre quoique ce soit, on attend qu’ils viennent à nous.
« On ne force jamais les enfants à apprendre quoique ce soit, on attend qu’ils viennent à nous et nous pouvons alors leur délivrer, en petit groupe ou même en tête à tête si nécessaire, certains savoirs », m’explique une prof. J’ai pu voir effectivement ce matin, pendant deux heures, quelques enfants se succéder dans une petite salle équipée d’une table, avec une enseignante.
Il est certain que la plupart des enfants de cette école ont moins de connaissances académiques que ceux de d’autres écoles classiques, mais l’idée, c’est que ce n’est pas aux adultes de décider de ce qu’il faut apprendre quand on est enfant, mais aux enfants eux-mêmes. « Comment peut-on s’attendre à ce qu’un enfant devienne un adulte responsable et motivé si l’on a toujours attendu de lui qu’il fasse simplement ce qu’on lui dit ? » En gros il n’y a pas de hiérarchisation des savoirs et compétences. Chacun doit trouver sa voie.
« Et puis surtout, il faut laisser les enfants être des enfants, ça ne dure déjà pas très longtemps, ce temps de liberté, alors c’est triste de vouloir couper court à cela, non ? La retraite est à 65 ans, bientôt à 67, alors ils auront bien le temps de travailler plus tard ! » Ajoute, mi-espiègle, mi-désabusée une des grand-mères enseignantes.
J’ai là encore été positivement surpris par la capacité des enfants à organiser des jeux incluant des dizaines d’entre eux, de tous âges, sans entrer dans des conflits, et sans qu’un « chef » ne cherche à s’imposer, même si les plus petits cherchaient moins à s’exprimer que les grands. Pendant au moins deux heures l’après-midi, ils jouèrent (et moi avec, j’ai été invité et très bien accueilli par tous), dans la plus grande bonne entente, et l’enseignante n’eut à intervenir qu’une seule fois, en marge du jeu, pour consoler deux enfants qui s’étaient rentrés dedans et encadrer un meeting entre eux.

D’autres enfants jouent en petits groupes dans la salle de sport (décorée de fresque réalisées par les enfants), d’autres construisent de grandes cabanes à base de larges barriques en métal, branches et bâches, tandis qu’un petit garçon malicieux mais manchot vient de parvenir à faire du vélo à deux roues et crie sa joie (et il y a de quoi, c’est impressionnant !). On dirait vraiment une grande colonie de vacances.
Le philosophe Krishnamurti approuverais sans doute en partie l’esprit de l’école : lui qui estime que ce n’est pas au gouvernement ou à quiconque de décider pour les individus de ce qui est bon pour eux. Selon lui les programmes contribuent uniquement au formatage des individus, qui sont alors supposés avoir des savoirs « de base » identiques, au détriment du développement des passions et intérêts propres à chaque personne.
Je suis convaincu en outre que dans les classes où un savoir est délivré tout cuit et surtout où la présence est obligatoire, les élèves ne retiennent que très peu, d’autant plus que les savoirs en question ne font que peu de sens et semblent totalement arbitraires car ils ne répondent pas nécessairement aux interrogations qu’ils se posent. Dans le meilleur des cas, les élèves apprennent alors passivement et tels des robots pour le jour de l’évaluation et oublient une semaine plus tard ce qu’ils ont appris. Dans le pire des cas ils dérangent la classe en étant turbulents voire même violents et entrent dans une logique d’opposition générale à toute forme d’apprentissage qui n’est bénéfique pour personne.
Selon les enseignantes, les enfants de Tamariki réussissent aussi bien au collège et lycée que les autres enfants, issus eux d’écoles primaires lambdas, et n’ont pas de mal à s’adapter à un système plus conformiste qui requiert même souvent de porter l’uniforme. La plupart des enfants cependant iront dans l’un des deux collèges « alternatifs » à la pédagogie la plus proche de celle de Tamariki, dont Ao Tawhiti Unlimited Discovery, l’autre école que j’ai observée pendant mon séjour en Nouvelle-Zélande.

Je dois dire que si je trouve bien l’idée de laisser les enfants libres de choisir ce qu’ils apprennent, je trouve dommage l’absence d’exposition à des savoirs dont les enfants ignorent l’existence même. Comment savoir que l’on a envie d’apprendre l’allemand si l’on ne sait même pas que cette langue existe ? Comment s’intéresser à l’architecture lorsque l’on ne sait pas ce que veut dire ce mot ? C’est pourquoi je préfère à Tamariki l’autre école néo-zélandaise que j’ai visitée, qui permet aux enfants d’apprendre ce qu’ils souhaitent mais les expose aussi en permanence à des tonnes de savoirs, par le biais d’ateliers facultatifs proposés par les enseignants, les parents, des intervenants extérieurs rémunérés ou volontaires, et même par les enfants eux-mêmes, etc. (Pour plus d’information, voire la page consacrée à Ao Tawhiti Unlimited Discovery).
Atmosphère familiale (détendue)
Ce n’est pas sans raison que l’école donne l’impression d’être une maison. Le but des fondateurs de Tamariki était de créer une sorte de prolongement de la cellule familiale, un endroit cosy où l’on se sent compris, aimé, encouragé, et où l’erreur est vécue comme une étape nécessaire à tout apprentissage. La famille idéale en quelque sorte.
Les parents peuvent d’ailleurs passer autant de temps à l’école qu’ils le souhaitent, sans qu’une tâche ne leur soit attribuée (à moins qu’ils ne le désirent), simplement comme soutien émotionnel pour un enfant qui en aurait besoin par exemple (ce qui a été particulièrement le cas suite aux tremblements de terre de magnitude 7 sur l’échelle de Richter, en 2010 et 2011, qui firent près de 200 morts à Christchurch).
Les enseignantes n’hésitent pas à donner des câlins aux enfants, et j’ai vraiment l’impression de voir de sympathiques mamies-gâteaux plus que des profs.
Cette famille Tamariki n’est pas très regardante non plus sur la propreté du lieu : le sol est parsemé de miettes, de bouts de chips. Les salles sont en désordre (parfois même un extrême désordre). Mais là encore, comme on me l’explique après que j’ai manifesté mon étonnement, si les adultes ne sont pas très regardants, c’est pour des raisons pédagogiques : d’une part pour que les enfants fassent l’expérience des inconvénients du désordre (on ne s’y retrouve plus, on se prend les pieds dedans, etc.) et qu’il leur vienne naturellement à l’esprit de ranger ; d’autre part parce que les éducatrices estiment que cela ne vaut pas la peine de brimer les enfants plongés en pleine activité pour si peu : « on peut bien attendre un peu pour les faire ranger, ça ne presse pas ! »
A la fin de la journée, les enfants sont de service pour effectuer des tâches ménagères dans toute l’école. Il s’agit jusqu’à la fin de la journée d’être responsable de sa vie et de son environnement (même si une femme de ménage passera tout de même après pour s’assurer que les normes d’hygiène soient bien respectées.)

En conclusion, si la philosophie de l’école me plaît parce qu’elle respecte plus les désirs des enfants que n’importe autre école que j’ai pu voir ; qu’elle leur apprend à vivre en communauté de manière responsable grâce à l’outil qu’est la démocratie directe ; qu’elle permet aux enfants d’être des individus heureux, sociables et bienveillants (des qualités que j’ai retrouvées chez absolument tous les enfants de cette école), en revanche l’absence de stimulation extérieure me paraît être très regrettable. Je crois qu’on peut effectivement être heureux en ne sachant pas grand-chose et vivant un tas d’aventure, jusqu’au jour où l’on s’aperçoit de l’immensité des choses intéressantes que l’on n’a jamais explorées et qui rendent la vie passionnante.